En passant par là...

[Juste moi et Esther svp]

Séphane arriva sur le balcon qui, par chance, était déserté - toujours désagréable de faire fuir des gens, en portant deux lourdes bouteilles.

Gardant son précieux butin - une lourde bouteille de coca, une plus petite de jus de fruits inconnu, et une flasque d'alcool - c'etait probablement interdit mais qui le saurait? - Stéphane grimpa avec agilité et rapidité sur le mur, utilisant les quelques prises faciles qu'offrait la maconnerie du bâtiment, puis posa toutes ses affaires en haut et attendit l'arrivée de la jeune anglaise, allongé sur le toit de sa prison.

Ce toit n'était pas vraiment pratique - composé de tuiles en pentes, on risquait de glisser et se tomber loin, loin, loin, en bas. Heureusement, une gouttière assez solide permettait de caler ses pieds et de s'affaler dessus sans crainte; de plus, au-dessus du grand balcon, il devenait plus plat, et plus accesible par là même: on pouvait se tenir debout dessus sans crainte.

Stéphane attendit donc, espérant que la jeune anglaise n'était pas trop frileuse (on était en hiver) ou qu'elle aurait pensé à apporter une couverture.

Esther marchait d'un pas rapide dans les couloirs. Elle avait déjà eu a subir les interrogations d'une des filles de sa chambre à propos de sa sortie nocturne, fille a laquelle elle avait dit qu'elle allait dormir dans le quartier des eleves parce qu'elle avait besoin d'etre seule. La jeune anglaise en avait profité pour embarquer une couverture.

Elle arriva donc sur le balcon. La jeune anglaise avait troqué son pantacourt rouge contre son eternel jean trop large et son tee shirt contre un sweet bien chaud à capuche. Avec agilité, elle se hissa sur le toit à l'aide de la rembarde du balcon et du chaineau. Elle alla s'installer a coter de Stephane et posa sa couverture a coter d'elle. Il ne faisait pas encore assez froid pour s'envelopper dedans.

"J'ai pas été trop longue j'espere ?"

Elle eut un sourire et regarda le "butin" du jeune homme.

"Bah ca va, on a de quoi faire avec ça..."

Elle sorti une bouteille de sa poche kangourou et la posa a coter des autres puis elle s'alluma une cigarette.

"Tiens ca trainait dans l'armoire d'une des filles de ma chambre..."

"Ouais ben déballe pas tout, juste au-dessus du balcon c'est pas génial."

Il prit ses affaires, puis se leva, et marcha précautionneusement sur la gouttière, sans toutefois n'éprouver aucune crainte quant au vide sous ses pieds. Il connaissait les lieux.

Il fit toutefois signe à Esther, les bouteilels sous les bras, de faire attention: la gouttière, bien qu'elle soit plus solide qu'elle n'en avait l'air, n'était pas indestructible pour autant. Et il serait dommage de la voir périr bêtement comme ca. D'autant plus qu'elle avait peut-être d'autres denrées interressantes.

Ils finirent par arriver sans encombres vers ce qui semblait être une zone relativement plate, orientée vers le nord, et sans rien pour gêner la vue. Stéphane posa ses bouteilles, se tint assis, et annonca:

"Vala, tu peux ressortir ta clope, on est arrivés."

Il ouvrit une bouteille et but.

Esther se releva et le suivit sur la gouttière. Pour une fois que ses années de natation lui servaient, elles lui avaient cpnferées une certaine agilité très pratique dans ces cas là.
La jeune fille avait remi sa bouteille dans la poche de son sweet et portait sa couverture sur son épaule, faisant bien attention de ne pas se prendre les pieds dedans. L'anglaise arriva bientot près de Stephane et se mit assise à coter de lui. La jeune fille sorti alors un paquet de cigarette de sa poche et s'en alluma une.

"On a une belle vue d'içi...Ca change de l'interieur du pensionnat quand meme !"

Esther eut un petit sourire et ouvrit la bouteille qu'elle avait dans sa poche. Elle commenca alors à boire, son contenu plaisait assez à la jeune fille.

"et c'est tranquille surtout. Personne ne vient m'embêter. Surtout révèle pas ce lieu à quelqu'un, ou j'me fâcherais, d'accord?" répondit-il.

Il but encore au goulot de sa bouteille et se tut.

Son regard était captivé par les étoiles brillantes sur le velours noir de la nuit. Il semblait que plus rien d'autre n'avait vraiment d'importance et qu'il pourrait regarder les étoiles jusqu'à la fin des temps. Perles blanches sur velours noir...

"D'accord, je ne dirais rien. Tu as ma parole !"

La jeune fille ponctua sa phrase d'un petit clin et jeta le megot de sa cigarette dans le vide. Puis elle s'allongea, les bras croisés derrière sa tête. Malgrès l'hiver, il faisait doux à cette heure pourtant tardive. Esther, tout comme Stephane, regardait les étoiles scintiller dans le ciel. Pour une fois qu'ils pouvaient etre tranquils dans ce pensionnat. La jeune anglaise se redressa et but une nouvelle fois dans sa bouteille puis regarda son camarade.

"Il y a longtemps que tu as decouvert cet endroit ?"

Stéphane s'arracha lentement de sa contemplation:

"Mouais... je n'aime pas trop cet endroit, alors je cherche des coins cachés; et le toit est généralement un endroit oublié ou fui. Donc je suis allé explorer dès que je suis arrivé ici, ou presque..." répondit-il d'une vois fatiguée ou ininterressée.

Il but encore un peu, puis s'allongea à coté d'elle.

Silence.

"C'est joli" fit-il, un peu inutilement.

Esther aussi trouvait ça joli alors elle acquiesa d'un leger signe de tête. Elle se redressa d'un coup et se mit assise en tailleur. La jeune fille fouilla dans sa poche et en resorti un paquet de biscuits salés. C'etait pratique les poches kangourou, on pouvait y mettre toutes sortes de chose plus ou moins utiles. Esther ouvrit le paquet et le tendit à Stephane.

"T'en veut ? Je l'ai piqué dans la salle de bal parce que c'est bien beau de boire mais il faut manger aussi."

La jeune fille prit un biscuit et le mangea. Ils avaient un gout bizarre mais c'était toujours mieux que ce qu'ils leur servaient à la cantine.

"Ouais merci" répondit-il simplement. Il prit un gateau et mangea; Stéphane n'était pas difficile quan à la nourriture et se contentait de ce qu'il avait. Il avait bien passé des journées sans rien manger, en devant quand même se battre jusqu'à l'effondrement...

Il resta allongé sur le toit, le regard perdu dans les astres. Il ne savait pas vraiment quoi dire, et restait silencieux. Cela ne changerait pas vraiment de d'habitude de toutes facons...

Esther posa le paquet de gateau sur le toit et sorti ses cigarettes. Elle s'en alluma une et commenca a fumer en silence. Ses yeux étaient braqués sur le ciel et elle regardait les étoiles. C'est vrai qu'elles étaient belles. La jeune fille rammena ses genoux a son menton et fixa l'horizon.

"Tu comptes faire quoi en sortant d'ici ?"

Elle se retourna et le regarda avec un leger sourire aux levres.

La question le surpris. Stéphane n'y avait jamais vraiment pensé, il était maintenant surtout concentré sur "comment sortir d'ici".

"Je ne sais pas du tout" avoua-t-il "je pense que ce sera comme avant, la vie dehors, le mercenariat, les combats et les bouteilles..." à défaut de vivre autre chose. Après tout, son ancienne vie était ce qu'un démon pouvait avoir de mieux...

"Et puis, de toutes facons, au point ou j'en suis, une réintroduction dans leur putain de société normale est impossible. Et je n'en veux pas." ajouta-t-il, comme à regrets.

*Et elle ne voudra pas de moi... qui voudrait d'un démon?*

"E toi?" questionna-t-il brusquement, déviant la question qui se révélait plutot embarrassante sur elle.

Esther mit un certain temps à repondre. Dès qu'elle était entré dans ce pensionnat, elle n'avait qu'un seul but: En sortit. Pour aller où ? Pas chez son père en tout cas. Ah ça non ! Plus jamais elle ne retournerais chez cet homme qui l'a abandonnée. Elle se rechoucha alors sur le flanc, appuyant sa tête sur sa main. Elle fixa Stephane.

"J'en sais rien. J'aimerais bien retourner en Angleterre..."

La nuit revdevint silencieuse. La jeune anglaise laissa alors échapper un soupir.[i]

"Il faut déjà que l'on sorte d'ici..."

"Ouais" fit-il. "Quand tu repartiras en Angleterre, je te verrais probablement plus jamais. J'ai pas vraiment d'endroits ou aller, et je m'en fous pas mal en fait. Ici ou ailleurs, ma vie est pareille; mais je n'aime pas être enfermé, c'est tout..."

Il but au goulot, puis reporta son attention sur les étoiles.

Après tout, qu'importait son existence tant qu'il pourrait avoir des moments libres comme celui-ci... Il était maudit après tout, il ne devrait pas se plaindre de ce qu'il a...

"Probablement mais je suis pas encore sûre d'y aller...De toute facon, je ne sais pas quand et comment je vais sortir d'ici."

Esther but dans sa bouteille et la reposa sur le toit. Elle piqua deux ou trois gateaux salés et s'allongea sur le dos. Elle regarda les étoiles. Le froid commençait par se faire plus prenant mais pas encore assez pour que la jeune anglaise se blotisse dans sa couverture.

"Moi non plus je n'aime pas etre enfermée mais on a pas le choix.."

Stéphane posa sa bouteille à côté de lui puis renvoya son regard vers les étoiles.

"Oui on a le temps avant de savoir ou aller... si jamais on partira..." fit-il d'une voix atone; " mais on finit par s'adapter à ce trou à rats..."

Il frissona.

"Dis, si on mettait la couveture? Dehors c'est bien, mais j'ai pas envie de choper un rhume comme l'aute fois."

Esther acquiesa d'un signe de tête et s'empara de la couverture. Elle la deplia, celle ci était bien assez grande pour qu'ils tiennent tout les deux en dessous. La jeune anglaise s'approcha de Stéphane et jeta la couverture sur leurs épaules. Ensuite, elle rammena ses genoux à son menton et posa la tête dessus. Son regard se perdit alors dans l'immensité de la nuit.

"C'est sur. De toute facon meme si on ne supporte pas la vie ici on a pas tellement le choix. C'est ca ou la maison de redressement...Quitte à choisir, je prefere encore passer mon adolescence ici."

Elle eut un vague sourire en coin.

Stéphane rentra ses doigts dans son pull pour arrêter la sensation de brûlure due au froid. Ce sera pire en rentrant dedans, mais tant pis.

"Peut-être... faut faire c'qu'on peut avec c'qu'on a." répondit-il bêtement; " et ici ou ailleurs, c'est pas drôle tout les jours. Ici je suis enfermé, je suis flicqué en permanence, mais y'a à bouffer et j'ai un endroit ou dormir chaque nuit. Dehors c'est différent..."

Et puis ici, on ne savait rien sur sa malédiction. Il n'avait pas vraiment besoin de plus que cela, en fait... un peu de temps en vivant sans, mettre tout sur "pause" pour un court instant, et en profiter jusqu'à ce que "ca" revienne et qu'il faille tout recommencer comme avant.

Il avait raison. Ici il y avait constamment un pion ou un prof à leurs basques tentant desesperement de savoir ce que les pensionnaires faisaient de leurs temps libres. Alors déjà que les temps libres étaient rares mais en plus, il fallait qu'ils se tapent les pions. Esther fit la moue, vivement qu'elle soit majeure. Elle avait compris que le seul moyen de se tirer d'ici était d'attendre sa majorité et d'etre enfin relachée.

"Ouai c'est sur qu'on a un toit au dessus de la tête. On est nourris, logés, blanchis tout ça aux frais des idiots qui nous on fait enfermer...Mais bon, je prefererais être ailleurs..."

La jeune anglaise vida le reste de sa bouteille d'une traite avant de la reposer à côter d'elle. L'alcool qui lui brulait la gorge rechauffait un peu ses membres ankylosés par le froid.

"Moi je m'en fous." conclut-il.

Il prit la petite flasque d'alcool chipé à un des fêtards d'en bas, et but longuement. Il ne faisait pas chaud, mais il avait connu pire. Ici, il était difficile d'avoir vraiment à se battre pour la bouffe ou le logement. Mais dehors, pas de prison.

*Ca ressemble un peu à une histoire d'un loup et d'un chien, écrit par j'sais plus qui... au final, le loup préférait crever de faim plutot que d'être enfermé... oh ce n'est pas grave. De plus, même si je suis enfermé, je reste un loup...*

Et ici, on voyait les étoiles. Oublions le reste...

Esther eut un vague sourire en coin. Elle aussi s'en fichait un peu mais elle prefererait être en Angleterre, son beau pays natal. Elle poussa un long soupir avant d'ouvrir une autre bouteille d'alcool et d'en boire un bon quart. C'est qu'elle avait une bonne descente la petite anglaise.

"Ouai, t'as peut etre raison...De toute façon dans un an j'aurais 18 ans et je m'en irais !"

La jeune fille semblait être bien sure d'elle. Elle s'allongea sur le toit croisant les bras derrière la tête et regardant les étoiles.

Stéphane ne répondit pas et but un grand coup. Il y eut un blanc dans la discussion, et, à cause du froid ou de l'alcool, il se serra un peu plus contre la jeune fille.

Puis, après un long moment de reflexion, il finit par annoncer, l'alcool aidant peut-être:

"Je représente quoi pour toi? Suis-je un ami?"

Il ne savait pas vraiment pourquoi il avait posé la question... Peut-être n'était-il pas sûr de la facon dont il la voyait, peut être voulait-il la tester un peu plus, ou peut etre etait-il juste en train de tomber dans l'ivresse... Quoi qu'il en soit, il avait posé la question.

Esther le laissa s'approcher d'elle sans rien dire avec un sourire aux lèvres. Peut etre aussi que les effets de l'alcool commencaient à se faire sentir. Elle se tourna sur le flanc et regarda Stephane lorsqu'il lui demanda si il était son ami. Elle repondit en souriant.

"Bien sur que tu es mon ami sinon je ne serais pas là."

Son sourire s'élargit et elle ajouta.

"Pourquoi tu me demandes ça ?"

La jeune anglaise se saisit de la bouteille qu'elle venait d'ouvrir et en but une gorgée.

"Je me demandais si on pouvait penser être ami de quelqu'un sans vraiment le connaître" répondit-il, un peu provocateur.

*C'est de l'inconscience en tout cas ... tu te dis amie d'un démon ... *

Stéphane finit sa bouteille en prenant son temps puis la jeta au loin. Elle voltigea dans les airs, brillant sous les étoiles, puis disparut dans le vide, sans bruit.

"Et tu ferais quoi si en fait je ne m'était que fait passer pour quelqu'un de sympa, et que je t'aurais amenée ici pour t'agresser?"

Esther regarda la bouteille voltiger dans les airs puis se retourna vers Stephane, surprise de sa question. C'est vrai, elle n'y avait pas pensé: Elle était quand meme dans un pensionnat pour deliquants. Puis, elle fronca les sourcils.

"Qu'est-ce que j'aurais fait ? J'en sais rien moi, ca se prevois pas des réactions comme ça..."

Elle but une gorgée d'alcool avant d'ajouter.

"Elle est bizarre ta question..."

Les réflexes rapides malgré son esprit un peu embrumé par l'alcool, Stéphane enroula ses deux mains autour de la gorge de la jeune fille, serrant assez pour ne la laisser respirer que difficilement.

"Un geste et je t'étrangle", la prévint-il, sachant très bien que malgré tout ce qu'elle pourrait faire, il tiendrait bon - elle ne sera pas la première à tenter de se débattre... "Tu vois" fit-il, le regard hagard," je peux être dangereux... et je suis loin d'être ce que tu crois ... tu penses vraiment être mon amie?"

On ne peut pas être l'ami d'un démon; il ne fallait pas qu'elle se rapproche trop de lui car si la malédiction se reveillait, Esther serait en position de force pour l'attaquer et frapper le plus fort possible sans qu'il ne puisse rien faire.

Une amie ... c'est ridicule. Stéphane n'avait jamais eu d'amis. Quelle preuve de faiblesse. le meilleur des guerriers, s'il veut survivre en solitaire, se doit d'être imprévisible. Et avoir des amis n'est alors qu'un point faible...

*Esther ... oublie-moi. Ou craint-moi, c'ets ce qui est le mieux possible.*